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Lex libertatis lex caritatis*
par Gianni Valente

Il potere e la grazia. Attualità di sant’Agostino, Nuova Òmicron, Rome 1998, 200 p.
Ainsi la redécouverte du De Civitate Dei permet d’un côté de dépasser l’augustinisme médiéval et moderne et, de l’autre, de valoriser de façon critique (selon l’indication de l’apôtre Paul: «Vérifiez tout: ce qui est bon retenez-le» 1Th 5, 21) les instances de la philosophie des Lumières. Voltaire lui-même dans le Traité sur la tolérance, en réponse à un abbé français qui parvenait, en citant des expressions augustiniennes, à justifier les guerres de religion, invitait à revenir à saint Augustin et aux Pères de l’Église. Voltaire écrivait: «Permettez-moi de m’en tenir à votre première opinion: en vérité, elle me semble meilleure».
La déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae du Concile œcuménique Vatican II peut être considérée, comme le disait le pape Benoît XVI dans son discours à la Curie romaine du 22 décembre 2005, comme un exemple de ce retour à la tradition biblique et patristique.
Le cardinal Jean-Jérôme Hamer rappelait que «la contribution la plus positive pour l’avenir de la déclaration sur la liberté religieuse» avait été l’intervention, en assemblée, devant tous les pères conciliaires, de Mgr Carlo Colombo sur la surnaturalité de la foi chrétienne. Si la reconnaissance de la foi naît de l’attirance de la grâce, elle ne peut venir, par sa nature, que du cœur et ne peut donc être que libre: «Credere non potest nisi volens. Si corpore crederetur, fieret in nolentibus: sed non corpore creditur. Apostolum audi: “Corde creditur ad iustitiam”. Et quid sequitur? “Ore autem confessio fit ad salutem”. De radice cordis surgit ista confessio / On ne peut croire que si on le veut. Si l’on croyait avec le corps, cela pourrait advenir aussi en ceux qui ne le veulent pas, mais on ne croit pas avec le corps. Écoute l’Apôtre: “On croit avec le cœur pour obtenir la justice”. Et comment poursuit-il? “Et avec la bouche on reconnaît la foi pour obtenir le salut”. De la racine du cœur surgit cette reconnaissance» (Augustin, In Evangelium Ioannis XXVI, 2).
Dans la déclaration Dignitatis humanae, on peut aussi saisir, semble-t-il, un élément augustinien dans la claire distinction entre le principe de la liberté religieuse, qui vaut pour tous, et «la liberté de l’Église, c’est-à-dire la liberté dont le Fils unique de Dieu a doté l’Église qu’il a acquise de Son sang» (Dignitatis humanae, n. 13). L’Église revendique pour elle cette liberté qu’elle demande pour toutes les autres expressions religieuses, à savoir la liberté religieuse. Mais le critère de son jugement et de son action est la liberté que par grâce le Fils unique de Dieu lui a donnée: la liberté des enfants de Dieu (cf. Rm 8, 21). La libertas Ecclesiae est la libertas caritatis (Augustin, De natura et gratia (65, 78). La liberté de l’Église est la charité. Et comme «la libertas Ecclesiae est un principe fondamental dans les relations de l’Église avec les pouvoirs publics et tout l’ordre civil» (Dignitatis humanae, n. 13), il faut demander dans la prière que le Seigneur donne ce qu’il commande: «La charité est longanime, la charité est serviable; la charité n’est pas envieuse, elle ne fanfaronne pas, elle ne se rengorge pas, elle ne fait rien d’inconvenant, elle ne cherche pas son intérêt, elle ne s’irrite pas, elle ne tient pas compte du mal, elle ne se réjouit pas de l’injustice mais elle met sa joie dans la vérité» (1Co 13, 4-6). On trouve un exemple petit mais important de la liberté propre à la charité dans la lettre que le pape Benoît XVI a envoyée aux catholiques chinois.
*Augustin, Épîtres 167, 6, 19